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À propos des MRBAB, du Musée d’art moderne, des tarifs des musées fédéraux…

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Les musées sont des organismes vivants, qui doivent évoluer avec leur temps. Pour autant, ils sont au service du public et doivent le respecter. Ce sont des lieux de recherche, des instruments d’éducation et de réflexion chargés de préserver et de présenter le patrimoine, mais ils ont également pour mission d’éveiller et de développer la sensibilité des visiteurs.

Or, par une décision unilatérale de leur directeur prise en février 2011, les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique’, vieux de près de deux cents ans, ont été amputés de tout leur département d’art moderne… Nous ne pouvons que le répéter : fermer un musée et réduire ses œuvres au silence a quelque chose de choquant.

Une « première », cette fermeture ? Non. Bruxelles s’est déjà retrouvé sans Musée d’Art moderne. C’était en 1959 et il a fallu vingt-cinq ans pour le ramener à la vie ! Allons-nous revivre un tel scénario… ? Sans doute. Même si les circonstances ne sont pas les mêmes, ni les responsables, l’histoire bégaye souvent… En 1959, c’est en vue de la transformation du Mont-des-Arts et de l’agrandissement de la Bibliothèque royale que le musée d’Art moderne, qui occupe alors le Palais de Charles de Lorraine, Place du Musée, est contraint de fermer ses portes. Sine die. Comme aujourd’hui, il est annoncé qu’on lui trouvera un lieu. Les propositions envisagées, dont la Bourse, le site de l’Expo 58, le bâtiment Glaverbel, Meise, le Cinquantenaire… sont toutes aussitôt abandonnées. Comme la décision tarde, des locaux provisoires – l’ancienne bijouterie Altenloh, 1, Place royale – lui sont affectés en 1962. Les lieux sont exigus, à cette époque, mais la direction se démène et, à défaut de pouvoir déploier ses collections permanentes, elle y présentera quelque 100 expositions temporaires jusqu’en 1978 !

En 1966, enfin, la décision est prise : on construira un nouveau musée ! Roger Bastin (architecte du nouveau Musée de Mariemont) est sollicité. Avant-projets, contestations (entre autres de l’Aarau), nouveaux projets. Après consultation d’une commission internationale composée de muséologues, de sociologues, d’urbanistes, d’architectes, le site est choisi et le projet d’un musée souterrain, sur huit niveaux, confirmé. Il est inauguré en 1984.

Et fermé à nouveau, un quart de siècle ans plus tard… Brutalement, sans concertation. Logique puisque – cela a été dit – il n’y aurait pas, il n’y aurait jamais eu d’art moderne en Belgique… ! En lieu et place, il est décidé de créer un nouveau musée dit « fin de siècle ». Fin dix-neuvième siècle, s’entend avec, ce qui a du sens, un prolongement jusqu’en 1914, ce qui n’empêche que le renouveau, les ruptures qui caractérisent la période qui vient ensuite ne devraient pas en être.
Si d’aucuns – inattentifs – n’ont pas encore pris conscience des conséquences profondes de cette décision, d’autres s’en émeuvent, se sentent trahis. Artistes, enseignants et étudiants, responsables d’associations d’éducation permanente, critiques d’art, gens de musées, intellectuels de tous bords et citoyens et citoyennes…, n’ont pas accepté la situation. Les actions de protestation menées depuis février 2011par le collectif MSM – MZM (Musée sans musée – Museum zonder museum) ont été pacifiques, créatives, voire ludiques. Elles ont été remarquées. Certains organes de presse lui ont réservé un bel écho (RTBf, La Libre…). Pas tous. Des lobbys ont dû jouer… Il faut dire que le directeur des MRBAB se sent soutenu par les Ministres responsables successifs et leur administration. Sabine Laruelle a laissé faire. Paul Magnette, qui lui a succédé, a proposé, sans pour autant désavouer la fermeture, d’utiliser des lieux inutilisés du Musée d’art ancien. Projet abandonné. Plus tard, Philippe Courard a d’abord parlé d’un musée itinérant, avant d’envisager d’autres projets. Tout cela sera (serait) très coûteux. Le projet de construction d’un nouveau musée – nécessairement prestigieux, donc assortis de prouesses architecturales du genre Guggenheim (ose-t-on avancer, sans avoir le premier euro…) – est régulièrement évoqué. Improbable dans le contexte financier actuel mais cela permet de différer le moment d’annoncer les impossibilités… En attendant, on serait à la recherche de sponsors privés susceptibles de financer un déménagement provisoire et coûteux vers les « Anciens magasins Vanderborght » – « ex-Dexia Center » qui, miracle, est tout près de la Grand-Place, ce qui confirme que la cible est bien le touriste.

Et la culture, dans tout çà ? La fonction première du musée, donc des Musées royaux des Beaux-Arts – Art ancien et art moderne – est-elle encore envisagée ? En renonçant à présenter une partie essentielle de ses collections (remarquons qu’une partie conséquente du Musée d’Art ancien est également inaccessible), l’institution prive le public de la possibilité de prendre conscience de la continuité et des ruptures dans la création artistique. De son histoire ! C’est un virage dangereux. Certes, le musée « Fin de siècle » sera sans doute intéressant (le contraire serait désolant). Mais c’est pour ce musée-là – comme pour le Musée Magritte – qu’il eût fallu trouver de nouveaux lieux !

La culture et l’éducation sont-elles toujours des priorités ? Doivent-elles encore bénéficier d’un accès démocratique ? Des protestations ont été émises à propos de changements dans la tarification des musées fédéraux, notamment des réductions et gratuités dont bénéficiaient les personnes âgées et les moins de dix-huit ans, les personnes handicapées et accompagnateurs, les demandeurs d’emploi et les bénéficiaires d’un revenu d’intégration. Les nouvelles mesures excluent certaines catégories de public – de fait – de l’accès à la culture. Les tarifs peuvent s’envoler jusqu’à 17,50 euros pour une exposition temporaire aux MRBAB ! Le site Consoloisirs de Bernard Hennebert s’en est fait l’écho et un certain nombre de personnalités politiques* s’en sont émues, attirant l’attention sur le fait que certains musées, dont les Musées royaux des Beaux-Arts, dispersent les sites, donc la présentation de leurs collections : à côté du musée d’Art ancien (donc sans musée d’art moderne) et du Musée Magritte, naîtra le musée Fin de siècle. Bien que Michel Draguet se soit – semble-t-il – engagé à ne pas faire de tarification spécifique…, la crainte est réelle que l’accès à l’ensemble des collections des MRBAB ne puisse se faire qu’à des conditions inacceptables.

* Plusieurs questions et interpellations parlementaires (de Damien Thiéry, Eric Jadot, Muriel Gerkens, Stefaan Van Hecke, Cathy Condyser, entre autres) ont été émises sur le fond de l’affaire mais aussi, plus récemment, à propos de la politique tarifaire des musées fédéraux.

Le groupe de travail « musées » de Culture & Démocratie, La Lettre de « Culture & Démocratie », 18/09/2013, n°68.

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Un sous-développement culturel organisé ?

Coups de griffes

Nos grands musées vont mal. La fermeture brutale du Musée d’Art moderne depuis février 2011 n’y est pas pour rien et la situation ne semble pas devoir s’améliorer. Il est intéressant, pour s’en convaincre, d’analyser l’éditorial de la brochure « Museum Life », signé par Michel Draguet, « Directeur général des Musées royaux des beaux-arts de Belgique et Directeur général a.i. des Musées royaux d’art et d’histoire » (pour ceux qui n’auraient pas tout compris : Musée d’art ancien « et moderne » / Musée Magritte / Musée Antoine Wiertz / Musée Constantin Meunier / Musée du Cinquantenaire / Musée des Instruments de musique / Porte de Hal / Musées d’extrême-Orient à Laeken… !)La presse, remarque Michel Draguet, s’est fait l’écho des projets et travaux menés au sein des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique et des retards engendrés par les mesures budgétaires qui ont paralysé le fonctionnement de l’Etat fédéral. (…Mais) des signaux positifs témoignent du bien-fondé de la réforme globale menée à l’échelle de la Politique scientifique fédérale (qu’il a lui-même suggérée…). L’avis positif – quoique circonstancié – remis par l’inspection des finances quant à l’installation dans les anciens magasins Vanderborght des collections allant de 1914 à aujourd’hui, ouvre des perspectives sur lesquelles il convient de revenir ici. Et Michel Draguet d’évoquer la « saturation » du site du Mont des Arts qui implique, estime-t-il, le nécessaire déploiement du musée d’art moderne hors du site historique. Il se questionne pourtant : Pour aller où ? Pour répondre à quelle mission ? (…) question d’autant plus cruciale que les attentes qui reposent sur le musée sont grandes. Et que si d’aucuns pensent qu’un musée peut changer la société, je crois au contraire que le trop plein d’aspirations dont on chargera le musée tuera inévitablement celui-ci (ah bon ? – n.d.l.r.). Rappelons ici que celui qui nous parle, ce « je », c’est bien Michel Draguet, un directeur de musée.

Il met cartes alors sur table et insiste : « Un musée, fut-il « moderne » et «contemporain », est aussi une entreprise qui doit capter un public dont on sait qu’il est aussi exigeant que capricieux ; peu mobile et effrayé par toute sortie des chemins balisés » (merci pour cette appréciation, pour ce peu d’estime pour le public concerné…). (…) Qu’on rêve de dynamiser tel quartier ou telle zone, il faudra intégrer les paramètres économiques qui détermineront la viabilité… » Suivent d’autres considérations à propos de l’éventuelle installation dans les magasins Vanderborght, proche de cette… Grand-Place qui reste le pôle magnétique de la politique touristique de notre capitale » et de ce « Museum Miles qui doit permettre de passer d’un musée à un élément du patrimoine architectural tout en gravissant la pente si dissuasive du Mont des Arts ». Michel Draguet est de plus en plus clair : le public qu’il recherche est dorénavant désigné, visé, et c’est bien le « touriste » ! Au moins il dépense.

Donc, Les magasins Vanderborght seront un premier pas dans la construction de ce chemin du patrimoine qui, de la Grand-Place au Mont des Arts et de ceux-ci au Cinquantenaire… poursuit Michel Draguet qui évoque pourtant… « un enjeu majeur dont la réussite dépendra de l’originalité du contenu de ce musée qui n’aura pas l’outrecuidance de se vouloir « moderne » – y eut-il jamais un art moderne en Belgique ? – et ne se résumera pas à n’être que contemporain – pris pour sa valeur chronologique primaire ». Comment peut-on vouloir un musée d’art moderne auquel on ne croit pas, l’espérer « original » alors qu’il suffirait de le penser « de qualité » ? Il promet de revenir sur ces questions dans le prochain numéro de sa revue. Sans doute pour tenter de convaincre à nouveau du bien-fondé d’une forme de culture à deux vitesses.

Favoriser l’accès aux musées ? À la culture ? Bernard Hennebert (Consoloisirs), dont on connaît l’activité en ce domaine – notamment pour la gratuité du premier dimanche du mois en Communauté française – doit se dire que ce qui est donné d’une main est souvent repris de l’autre… Le gouvernement fédéral et les ministres qui se sont succédé à la tête du secteur portent évidemment (ils ne sont pas les seuls) une responsabilité dans cette situation qui lèse surtout les publics les plus fragiles, les jeunes, les personnes âgées ou à faible revenu, les demandeurs d’emploi, les personnes handicapées.

Aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, depuis mai 2009 (citons Bernard Hennebert), le ticket « Musée d’Art Ancien et Musée d’Art Moderne » est passé de 5€ à 8€ pour une offre moindre, les œuvres de Magritte étant dorénavant regroupées dans un «musée» séparé, spécifique. En 2011, avec une offre muséale réduite à nouveau de moitié par la fermeture brutale du Musée d’Art Moderne, il eût été juste de ramener à 4€ le prix d’entrée au seul Musée d’Art Ancien ! Au Musée des Beaux-Arts de Rennes, par exemple, des salles étant fermées pour travaux, le prix d’entrée a été ramené de 4,45€ à 1,05€.

Mais à Bruxelles, les 8€ restent dus et, de manière générale, les réductions et gratuités en prennent un coup ! L’entrée était gratuite pour les jeunes de moins de 18 ans : seuls les moins de 6 ans (six !) profitent désormais de cette mesure. C’est 2€ de 6 à 18 ans. Passe aussi à la trappe la gratuité mise en place en 2009 pour les demandeurs d’emploi, ainsi que pour les personnes handicapées avec accompagnateur. La réduction aux + de 60 ans n’ira plus qu’aux + de 65 ans ! Sans explication ni concertation alors qu’un débat citoyen aurait pu se tenir avec les usagers culturels du service public. Des évolutions analogues se retrouvent dans les nouvelles tarifications d’autres institutions fédérales : Musée Magritte, Musée des Instruments de Musique, et autres. Pour qui sont ces musées que l’on ne saurait voir… ?

Concrètement : il y a quelques jours, une de mes amies à qui j’avais parlé de « Kandinsky et la Russie » une exposition aux MRBAB, m’a demandé si l’idée était bonne d’y emmener son frère, qui devait lui rendre visite à Bruxelles. Conçue et réalisée par la directrice adjointe du Musée d’Etat russe de Saint-Petersbourg, insistant sur le contexte et la relation avec d’autres artistes, tels Arnold Schönberg, Michail Larionov, Natalja Gontcharova, Kazimir Malevitch, l’exposition est intéressante sur le plan didactique. Quoique la période envisagée soit courte – elle s’arrête avant le Bauhaus -, elle est indéniablement belle.

Ne connaissant pas l’intérêt du frère de cette amie pour le surgissement de l’art non-figuratif à cette époque (1901 – 1922), je lui donne les arguments positifs, mais je la mets aussi en garde car elle n’est pas particulièrement riche et le prix d’entrée (guichet séparé, en relation avec la présence de Brussels Major Events asbl ?) qui est de 13 ou 14,50 euros en semaine (pas donné…) passe à 17,50 euros en week-end ! L’amie a renoncé. Je la comprends.

Où se niche donc la démocratie culturelle ? Et qui, désormais, parmi les politiques, s’en préoccupe ? *

Georges Vercheval, La Lettre de Culture et Démocratie, n° 67, 6/6/2013

* notons que le 22 mai dernier, Madame Muriel Gerkens, députée fédérale, a interpellé Monsieur Philippe Courard, Secrétaire d’Etat, à propos de la modification des tarifs fédéraux en ce domaine, considérant dans sa conclusion qu’une telle mesure était « anti-sociale, et un frein à l’accessibilité de la culture ».

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Le musée est plus indispensable que jamais

Le dossier Musée d’art moderne revient dans l’actualité. Non qu’il y ait de grandes avancées : les promesses du Ministre Magnette attendent toujours, l’hypothèse d’une installation des collections d’art moderne dans le Dexia Center refait surface sans agenda précis et sans perspective artistique sérieuse, le musée d’art contemporain fait l’objet de réflexions pour le moins opaques et les salles des MRBAB sont toujours partiellement fermées, toutes périodes confondues.

Un nouveau rassemblement, orchestré par Muséeesansmusée – MuseumzonderMuseum, s’est tenu hier (6 février) à 13 heures.

Il a rappelé aux responsables politiques, à l’heure du musée de Lens, de Metz, d’Essen etc… que les musées sont à la fois les lieux indispensables de la mémoire collective, de la rencontre et de la convivialité, du savoir, de l’émotion et du plaisir pour tous et toutes. Ils sont – et ce n’est ni un détail en ces temps de difficultés, ni une faiblesse marchande si l’exigence et le maintien drastique des logiques de service public sont au rendez-vous – à l’origine d’importantes retombées économiques.

Les MRBAB sont l’illustration désolante d’un musée en forme de trou de mémoire scientifique, artistique, éducatif, politique et économique. Un trou de mémoire culturel et démocratique. Les choix qui y ont été opérés depuis quelques années ont la légèreté de mauvaises bulles de savon.

(…)

Sabine de Ville, La Lettre de Culture et Démocratie, n° 65, 7 février 2013.

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Création d’une commission « Musées » au sein de Culture et Démocratie

La fermeture de la section Musée d’art moderne des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, début 2011, l’absence d’un Musée d’art moderne et d’art contemporain à Bruxelles ont suscité la levée d’un mouvement de protestation et d’action (…).

La situation n’a guère bougé depuis février 2012, date de la dernière manifestation de ce mouvement dans les MRBAB et mesures annoncées par le Ministre de tutelle Paul Magnette. Agenda flou, décisions sans cesse remises en question, salles toujours aussi dégarnies… et Musée Fin de siècle en chantier prolongé.

Cliché 2012-12-13 13-42-29

Les mondes politique et académique se sont exprimés à plusieurs reprises, mettant en question, et les arbitrages en matière de pôles, et la gestion actuelle des Musées. Presque toutes les questions restent pendantes…

Nous ouvrons les travaux d’une commission Musée au sein de Culture et Démocratie. Elle se donne pour objectif d’examiner, au-delà du dossier belge, ce qui peut faire sens aujourd’hui dans les politiques muséales. Les commissions de Culture et Démocratie sont des forums ouverts, elles n’ont de sens qu’à cette condition.

Bienvenue à ceux que cette question interpelle et intéresse : baptiste@cultureetdemocratie.be

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La lettre de Culture et Démocratie, n° 64, 12 décembre 2012

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Réponse de ‘Culture et Démocratie’ aux questions posées par le Ministre Paul Magnette à propos d’un futur musée d’art contemporain

Musée sans Musée a également répondu (lire ce texte) à la consultation (lire) du Ministre Paul Magnette.

Cliché 2012-12-13 13-42-29

En octobre dernier, nous avons répondu à l’invitation du Ministre Paul Magnette et lui avons transmis notre réaction à propos d’un projet de musée d’art contemporain à Bruxelles.

Ce courrier nous a donné l’occasion de répéter que sommes convaincus de ce qu’un musée d’art contemporain digne de ce nom est indispensable à Bruxelles. Mais nous sommes tout aussi convaincus de la nécessité qu’il y a pour cette ville de présenter aux publics, de manière cohérente et vivante, toutes les collections aujourd’hui conservées dans les Musées royaux des Beaux-arts de Belgique. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Pour nous, il est indispensable de penser, dans le même mouvement, la réponse rapide et sérieuse aux questions que suscitent aujourd’hui l’état des collections – du XVème au XXème siècle – et la conception et la mise en œuvre d’un musée d’art contemporain ambitieux à Bruxelles. Nos préoccupations et nos ambitions en matière de politique culturelle s’appliquent donc autant aux institutions existantes qu’à celles qui pourraient voir le jour.

Pour Culture & Démocratie, le changement et les réformes n’ont de sens que s’ils permettent aux institutions muséales d’améliorer significativement leurs missions scientifique et pédagogique (au sens large) à l’adresse de tous leurs publics et en particulier à l’adresse des jeunes. Ce qui se passe aujourd’hui aux Musées royaux des Beaux-arts de Belgique et aux Musées du Cinquantenaire ne va pas, selon nous, dans ce sens.

Alors un musée d’art contemporain, oui, bien sûr ! Comment se fait-il qu’il n’y en ait pas déjà un, depuis longtemps, dans la capitale de la Belgique et de l’Europe ? Voilà un projet enthousiasmant pourvu qu’il s’ancre dans une ambition scientifique et artistique et qu’il s’ouvre à tous.

Vous trouverez en suivant le lien, la réponse adressée au Ministre Magnette.

La Lettre de Culture et Démocratie, n° 64, 12 décembre 2012

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Musée d’art moderne, an 1

Il y a un an que la collection XXme et XXIme siècles est presque totalement inaccessible aux publics des Musées royaux des beaux-arts de Belgique.

Une année durant laquelle nombre de projets ont été évoqués sans qu’aucun n’ait pu, à ce jour, trouver un niveau de concrétisation sérieux. Une année durant laquelle le mouvement de protestation connu désormais sous le vocable ‘museesansmusee’ et ‘museumzondermuseum’ s’est exprimé, investissant le Hall du Musée, rue de la Régence, chaque premier mercredi du mois. Un mouvement d’abord contenu à quelques artistes et enseignants, aujourd’hui rejoint par de nombreux citoyens, artistes encore, enseignants du supérieur pédagogique, politiques, étudiants et jeunes, tous les publics de cette institution, alarmés à raison par l’enfermement dans les réserves, sine die, d’une collection de grande qualité.

L’échantillon dérisoire, présenté sous le label “Choix des conservateurs” atteste à lui seul de la perte subie par ceux qui aiment, et ce Musée, et cette collection.

Certes, un projet de musée d’art moderne et contemporain est une magnifique idée pour Bruxelles. Mais si cette aventure se concrétisait, elle le ferait à l’horizon 2025, au mieux. Combien de générations de jeunes, d’ici à 2025 ou 2030, qui n’auront d’autre choix que de prendre des trains vers les musées vivants et passionnants de Wallonie et de Flandre, ou les galeries, ou les centres privés d’art actuel qui se multiplient, pour fréquenter les artistes d’aujourd’hui ?

Culture et Démocratie situe ce dossier là où il se trouve : du côté de l’accès à un patrimoine symbolique, artistique et commun, et du côté de l’obligation qui est faite à une institution muséale de donner accès à tous ses publics, matériellement et cognitivement, à la part la plus large de ses collections. Il lui appartient de déployer avec toute son expertise, un dispositif qui permette à chacun d’appréhender avec plaisir, intérêt, et à son niveau, la richesse de la création en Belgique.

En attendant d’éventuels et hypothétiques lieux nouveaux, les espaces des Musées royaux des Beaux-Arts nous semblent suffisamment vastes pour permettre, même temporairement, une présentation large, exigeante et attrayante des collections du XXème et du XXIème siècle.
Nous plaidons sans désemparer pour un enseignement “en culture” et, à ce titre, la présence importante d’étudiants et d’enseignants dans l’actuel mouvement de protestation nous réjouit.

Nous demandons depuis un an le redéploiement à très bref délai de la collection d’art moderne dans les lieux dont elle est aujourd’hui soustraite. Nous demandons que les grands arbitrages en matière de politique culturelle fassent l’objet d’un débat large et démocratique. Sans nier les contraintes financières auxquelles sont confrontées les institutions culturelles, nous demandons qu’au cœur des politiques muséales, un équilibre réel soit préservé entre le bien commun culturel et artistique qui suppose l’exigence et l’aval excessivement donné à des stratégies qui privilégient la dimension économique et touristique de la culture. Nombre de musées belges et européens y réussissent…

Sabine de Ville, La Lettre de Culture et Démocratie, n°59, 31/1/2012

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Dossier Musée d’art moderne, suite …

Le mouvement Museesansmusee ne désarme pas et c’est tant mieux. Il poursuit son travail de résistance et continue à orchestrer, chaque premier mercredi du mois, une manifestation de protestation contre la fermeture sine die des collections XXe et XXIe siècles des Musées royaux des Beaux-arts de Bruxelles.

Non content de ne pas désarmer, le mouvement gagne désormais les établissements supérieurs d’art où les enseignants souvent artistes eux-mêmes et à la pointe du mouvement depuis son origine, et les étudiants se mobilisent pour donner à ces mercredis protestataires une dimension artistique parfaitement réjouissante.

Invention et créativité voire création au service d’un mouvement qui interroge le statut, la place, la fonction du musée dans la société contemporaine et puis plus fondamentalement sa gouvernance. En effet, un arbitrage aussi important que donner à voir ou soustraire au regard du public des pans entiers d’une collection publique a été dans ce cas précis, d’après nos informations, posé sans concertation, ni interne, ni externe.

Ce dossier crée l’opportunité d’un débat passionnant sur le musée : comment conjuguer les impératifs de gestion et de mobilisation nécessaire de ressources avec le maintien d’une haute exigence artistique, intellectuelle et didactique ? Comment en faire le lieu vivant et inventif du partage de la mémoire et de la création, comment y penser de manière critique le travail de transmission, comment le faire évoluer sans céder aux seules sirènes de l’événement et de l’industrie culturelle plus soucieuse d’intérêt privé que de bien public ?

Nous soutenons les interrogation et les actions de Museesansmusee. Et nous vous proposons de le faire aussi en vous rendant sur le site du même nom, en vous inscrivant au blog qui vous permettra de mesurer l’avancée lente mais décisive de la question dans la sphère politique et dans les supports de presse et vous joignant aux mercredis protestataires à venir. Celui de février marquera le premier anniversaire du mouvement. Notez déjà ce rendez-vous. Il doit être mémorable !

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En hommage

« Il est dans la nature humaine de s’engager par la culture dans ce que nous avons de plus humain. Mener des actions culturelles dont les acteurs restent propriétaires, qu’ils soient artistes professionnels ou citoyens créatifs ; des actions qui nous apprennent le monde, l’humain, avec ses côtés lumineux et ses sombres comportements ; des actions qui permettent l’acquisition des moyens d’expression, ouvrent des pistes de connaissances vers des moyens de se réaliser et mènent vers une prise de conscience réfléchie ou intuitive face au monde et aux folies des moins humains. « 

Marcel De Munnynck

La Lettre de Culture et Démocratie, n°57, 24 octobre 2011

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Coup de griffes

A propos de la fermeture du Musée d’art moderne. Suite.

Le mouvement de protestation porté par la plate-forme musée sans musée / museum zonder muséum ne faiblit pas. Le rendez-vous mensuel des défenseurs d’un musée d’art moderne vivant, à Bruxelles, a donné lieu le mercredi 7 septembre à une partie de tennis drolatique et mémorable. Illustration ludique et incisive de l’immobilité et de l’absurdité muséales, cette performance a vilipendé avec humour les choix – ou les non choix – qui sont à l’œuvre aujourd’hui aux Musées royaux des Beaux-arts. Ce mouvement nous intéresse parce qu’il interroge, bien au-delà d’un contexte politique et culturel particulièrement difficile, la question de la place et de la fonction du musée dans la société contemporaine. Est-ce bien encore, comme le posait l’ICOM (International Council of muséums) en 2007 « une institution permanente sans but lucratif au service de la société et de son développement ouverte au public, qui acquiert, conserve, étudie, expose et transmet le patrimoine matériel et immatériel de l’humanité et de son environnement à des fins d’études, d’éducation et de délectation. » ? Et si ce n’est plus tout à fait cela, ou pas seulement cela, qu’est-ce ?

Nous vous invitons à participer à ce débat culturel et évidemment citoyen. Son enjeu est rappelé dans le dernier communiqué de la plate-forme musée sans musée / museum zonder muséum: « On nous annonce un nouveau musée d’art moderne et contemporain dans 20 ans : Bravo !? Une solution intermédiaire dès 2012 dans les anciens établissements Vanderborght (à partager avec la Monnaie). Ceux-ci abriteraient un «laboratoire» qui préfigurerait le futur musée d’art moderne et contemporain. Encore bravo ! Nous sommes vigilants et le resterons tant que ces projets ne se transformeront pas en réalités concrètes. Notre demande n’a pas changé. Nous voulons, dès 2012, un redéploiement permanent des collections du XX° et du XXI° siècle. Nous sommes aussi sceptiques. Nous constatons en effet que les musées publics européens sont de plus en plus soumis à des pressions politiques et marchandes (collectionneurs, marché de l’art, tourisme, sous-traitants.. ). Cette double dépendance entrave la liberté et oriente les choix des directeurs de musée. La situation actuelle des MRBAB (Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique), tant dans leurs infrastructures que dans la présentation des collections permanentes d’art ancien et d’art moderne, s’inscrit dans ce contexte général de transformation, voire de dérive. Les musées sont tentés de donner la priorité à l’évènement aux dépens de leurs fonctions de conservation des œuvres et d’exposition du patrimoine au public. Le débat est là. Entamons-le ! »

Nous vous rappelons le rendez-vous fixé par la plate-forme musée sans musée / museum zonder muséum le mercredi 5 octobre prochain à 13 heures, rue de la Régence.
Informations complètes sur le site www.museesansmusee.wordpress.com

Sabine de Ville

La Lettre de Culture et Démocratie

n°56-23/09/2011

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A propos du musée d’art moderne

Culture et Démocratie s’associe au mouvement de protestation lancé par l’artiste Bernard Villers lors de la fermeture sine die du Musée d’art moderne. Ce mouvement auquel participent artistes, enseignants, intellectuels, amateurs, citoyens au sens large, s’est donné pour objectif de mettre en question cette décision unilatérale de fermeture et plus largement, une politique muséale trop inféodée à l’événement et aux séductions trompeuses du marketing culturel.

Car la question déborde largement le sort des collections d’art moderne. Toute la collection (art ancien et art moderne) des Musées royaux des beaux-arts fait les frais, depuis plusieurs années, d’une politique de dévitalisation sourde et continue qui soustrait au public une très grande partie des œuvres désormais confinées dans les réserves.

S’agissant d’une institution publique fédérale, dont la mission est tout à la fois de conserver, de développer et de diffuser les collections, nous nous élevons avec force contre ce qui constitue à nos yeux – et particulièrement pour ce qui est de l’art moderne – une véritable confiscation de patrimoine. Qu’il y ait, simultanément, une réflexion sur un éventuel projet de musée d’art moderne dont on sait qu’il ne peut voir le jour avant plusieurs années ne dispense pas l’institution de revenir sur la décision de mise au placard de la collection d’art moderne.

Familiers ou non des beaux-arts, tous les citoyens de ce pays et singulièrement les jeunes sont les détenteurs ultimes du capital culturel et artistique conservé dans ce musée.
Les touristes qui visitent Bruxelles et son musée des Beaux-arts ont certainement une curiosité susceptible de déborder l’œuvre de Magritte et un ensemble, même exceptionnel, « fin de siècle » qui se trouverait plus judicieusement exposé aux Musées du Cinquantenaire.
A défaut, il appartient à la Direction du musée, par l’étendue de ses choix et l’intérêt de ses propositions, de la stimuler ! Ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Donner à tous l’accès – matériel et cognitif – à l’ensemble de la collection, faire une place significative aux œuvres du XX° et du XXI° siècle, réaliser cela avec une ambition démocratique et une inventivité comparables à celles des grands musées d’Europe et du monde, voilà très concrètement ce que nous demandons à la Direction des Musées royaux des Beaux-arts de Belgique et aux responsables politiques.

Nous vous proposons de vous associer à ce mouvement dont les actions ont retenu l’attention de la presse en signant massivement la pétition qui vous est proposée par le collectif musée sans musée et en ralliant le rassemblement des protestataires qui a lieu chaque premier mercredi du mois à 13h00 dans le hall du musée. Venez-y en force !

Sabine de Ville 

La Lettre de Culture et Démocratie. n°55-16/06/2011

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